« Il n’y a pas de secrets dans la vie, seules des vérités cachées qui reposent sous la surface. »

« Ça aurait pu être moi. » Murmurais-je en baissant la tête, comme pour ne pas affronter son regard, un regard qui m’aurait renvoyé mon reflet en plein visage. « Ça aurait pu être toi. » Me répondit-elle droit dans les yeux, un sourire au coin des lèvres. « Le médecin m’a dit que tu ne passerais pas la nuit. » Répondis-je, ayant toujours détesté tourner autour du pot. Nos regards se croisèrent un instant puis se fuirent aussi rapidement. Faisant crisser les pieds d’une chaise que j’attirais vers le lit, je m’assis lentement sur le dossier, ajoutant plus doucement. « Tu ne vas rien dire, n’est-ce pas ? » Du semblant de force qui lui restait, je vis la jeune femme se relever pour me toiser avec animosité. « C’est donc ça ? Tu venais pour sauver ton cul ? Comment ai-je pu penser une seule seconde que tu ne ramènerais pas tout à toi, que t’arrêterais d’être aussi égoïste ? » « Tu vas raconter ce qui s’est passé ? » Dis-je sans réaction particulière. « Putain Lys ! Tu te rends pas compte de la situation. T’en as rien à foutre de ta vie, des autres, t’en a rien à foutre de tout et moi… moi j’ai pas le choix, je vais crever, tu le sais au moins ça ou ce ne sont que des mots qui ne veulent rien dire pour toi ? T’as la possibilité de changer tout ça. Tu peux changer. Et peut-être que si tu te bougeais le cul et que t’arrêtais d’être une sale égoïste, t’aurais peut-être une vie. » Si seulement ce qu’elle me disait me touchait, si elle savait à quel point ses mots n’avaient aucun sens pour moi, qu’ils n’étaient qu’un flot de paroles inutiles et tout aussi absurdes les uns que les autres, peut-être n’emploierait-elle pas ses dernières forces pour une cause aussi perdue que la mienne. « Je vais te laisser. » Dis-je sans plus d’égard alors qu’elle m’attrapait le bras pour s’assurer que ses paroles ne tombent pas dans l’oreille d’une sourde. « Réagis bordel ! Tu peux pas t’en foutre à ce point là, j’y crois pas, tout ça c’est… qu’une façade, tu te protèges n’est-ce pas ? » Insistait-elle comme pour se convaincre elle-même de ses propres paroles. Je me dégageais de son emprise et me levais alors qu’elle se mettait à hurler : « Si t’en vas Shiv… » Je grimaçais, détestant qu’on m’appelle par mon prénom de baptême. « Si je m’en vais quoi ? Tu vas tout balancer ? Ça ne m’étonnerait pas. Dans le genre salope, j’ai eu un bon modèle à la maison pendant toutes ses années. » Tandis que les pas du personnel de service résonnaient dans le couloir en direction de la chambre, je m’approchais une dernière fois du lit, excédée. « Tu veux savoir la différence entre toi et moi ? Elle est là. Toi dans un lit d’hôpital et moi debout sans aucune égratignure. Tu me traites d’egoiste ? Et bien je vais t’apprendre une nouvelle sis’. C’est comme ça qu’on s’en sort. C’est comme ça qu’on survit. Et je vais m’assurer que tu ne parles à personne de ce que tu sais... […] »

« L'hypocrisie est un vice à la mode et tous les vices à la mode passent pour vertus. »

« Aujourd'hui ça fait six mois que Claire est décédée. C'était plutôt moche. » Et surtout de ma faute mais qu'importe. « Au début, je n'ai pas compris, parce que je ne savais pas exactement ce qu'était la mort. » Je laissais planer un silence d'environ cinq secondes, assez pour faire croire que ce que je confiais était difficile mais pas trop pour ne pas rendre mal à l'aise, ce n'était pas le but. « Le jour ou on l'a enterrée, j'ai réalisé qu'elle était partie pour de bon. » Et mes secrets avec, optionnellement. « Je ne sais pas, je ressens comme un vide, une absence que je ne peux combler. J'ai lu quelque part que la perte d'un jumeau créait souvent ce sentiment... vous savez, comme si vous étiez arraché à votre autre moitié. » Je n'ai jamais compris pourquoi je n'avais pas ressenti cette perte, pourquoi le soir de son enterrement je m'étais rendue dans un bar pour y faire des rencontres, comme si de rien était, tout en ayant conscience que j'avais à jamais perdu ma seule et unique sœur, qui plus est ma sœur jumelle, ma moitié, mon entité. Certains se plairaient à dire que j'étais dans le déni. Au fond, qu'est-ce que le déni ? On parle souvent d'un refus d'admettre la réalité, d'une stratégie de défense. Peut-on parler de déni lorsque nous n'éprouvons rien pour le monde extérieur, pour les pertes qui nous incombent, pour les évènements qui rythment nos vies ? J'avais causé aussi bien indirectement que l'inverse, la mort de Claire et je n'en avais jamais éprouvé aucun remord. Et croyez-moi, cela me ronge, me détruit, m'engouffre peu à peu dans cette réalité, dans cette non-existence permanente. Comme j'aimerais ressentir quelque chose. Je suis un monstre et c'est ma vie. Je m'appelle Lysianna Lehane.

Je crois que plus on a et plus on veut. J'en veux toujours plus, je ne suis jamais satisfaite de ce que j'ai. Je parviens à faire céder un homme qui de prime abord semblait hors d'atteinte, j'en veux un autre. J'ai une nouvelle paire de chaussures, j'en veux une autre. Je crois m'attacher à quelqu'un et puis, à une autre personne, j'ai besoin de tout posséder, de tout avoir. J'ai peur de manquer de quelque chose, je crois. Et puis, vous connaissez le proverbe, à la chasse comme en amour, on commence quand on veut et on finit quand on peut. De plus, j'ai toujours besoin d'épater la galerie. Si un étudiant de ma promotion s'achète un cabriolet, j'ai besoin d'en posséder un d'encore plus performant. J'ai toujours été comme ça. Parce que mes parents ne m'ont jamais demandé si je voulais telle ou telle chose, j'avais automatiquement tout ce que je voulais. Mais tout avoir signifie qu'on peut encore avoir autre chose ou mieux. Et ma soif, ma gourmandise insatiable n'a de cesse de croître de jour en jour.

Dans la vraie vie, mon pseudo c'est : je ne sais pas. Je suis de sexe féminin (ou pas) et je vis en France. J'ai 18 ans. Je suis actuellement en rien du tout (aha) et je peux me connecter facilement 7/7 (disons un peu tous les jours mais à petites doses). Quand j'ai vu le forum, je me suis dit saleté, pourquoi tu me l'a montré, je craque. Si je veux un parrain ? oui.